Francesco mio,
Tu me connais bien mon joli coeur, je n’aime pas qu’on me marche sur les pieds !
Hier j’allais à la fabrique centrale de masques de notre guilde « Mystères, Ombres, Déguisements et Mystères » comme je le fais les jours où j’ai besoin de me faire louer par mes courti… heu mes fabricants préférés.
Et que vois-je en arrivant ? Mon fidèle Frère Hérético, se précipite vers moi et me fait son rapport de surveillance des fabricants.
Horreur ! Il m’apprend qu’un petit groupe de fabricants s’était retranché dans un atelier et fabriquait des masques non conformes à mes prescriptions !
Il y avait là l’ingrat Dupino, l’intrigante Di Cremoso, le duetto Cocobino, Lucia Di Ridero, Fabio Lauresti, et même, en esprit, la très très ingrate (car je lui ai tout donné comme chacun le sait) Virginia Votinetti et sa bande de lutins masqués.
Jusque là rien que des sous-fifres, pas de quoi fouetter un chat, mais je faillis m’étouffer lorsque je vis dans le fond de l’atelier la félonne, la perfide, la sournoise Corina il Pagini !
Et que fabriquaient ces intrigants ? Des masques VERTS !
Une commande spéciale de Daniele Competito se défendaient-ils quand je leur ai ordonné d’arrêter, car c’est moi qui ordonne ici, que diable !
Il Pagini l’effrontée m’a soutenu mordicus que les masques verts commandés par les Verdicce sont les seuls susceptibles de faire rebondir notre guilde depuis que Competito a fait fortune lors de l’élection des représentants de Venise à l’assemblée des villes de foire d’Europe (où notre guilde s’est plant..euh comportée honorablement) !
Or, comme tu le sais, j’ai choisis pour la collection printemps-été 1610 de délicieux masques roses orangeâtres qui scelleront notre amitié nouvelle avec les Pagliaci di Scena, et je ne tolèrerais pas que des masques verts orangeâtres, limite couleur caca d’oie, sortent de nos ateliers, en tout cas, pas tant que je ne le déciderai pas !
Je sais que tu préfèrerais qu’on se passe de notre collection de masques cette année, car les coûts de fabrication se sont envolés et nous aurons besoin de cet argent pour nous démarquer lors du superbe carnaval de 2012, qui précèdera l’élection du Doge. Mais il ne faut tout de même pas que nous perdions la main d’ici-là et produire une petite centaine de masques ici ou là pour quelques fidèles clients nous permettra de maintenir quelque peu notre savoir-faire.
Reste à faire passer ce manque d’ambition auprès de nos fabricants… mais je compte sur tes talents oratoires.
Je compte aussi sur toi pour m’aider à ramener tous ces petits cloportes dans le droit chemin et t’occuper sérieusement de la Il Pagini qui commence sérieusement à échauffer mes exquises petites oreilles (pour lequelles tu m’as toujours louée…).
Quant à l’ingrat Gistani, qui intrigue avec elle et a quitté la guilde pour développer son projet de lampions alternatifs, je te garantis qu’il n’aura bientôt plus aucun client pour sa fabrique de lampions, tu sais combien j’ai bien appris de toi.
Ta Marinellounette fraîche comme une rose
Ps : L’hérético toujours prompt à fayoter pour gagner mes faveurs, m’a aussi fait part pêle-mêle d’informations insolites sur d’autres sous-fifres qui me font dire que Venise est dans une situation bien étrange ces temps-ci :
– Les membres de la confrérie familiale du « Jesus GRID ressuscité » seraient revenus dans le droit chemin et font comme s’ils ne nous avaient jamais fortement mis en cause toi et moi,
– Francesca Bianca se serait faite attaquer par les paons du zoo de Venise,
– Gianfranco Democratico, ton fidèle serviteur, se livrerait en martyr et dans l’indifférence générale aux pires attaques de nos détracteurs,
– La princesse Mirabella, et c’est tout à fait plaisant, aurait perdu la mémoire à cause d’un philtre malencontreusement bu chez Melvina Silva la sorcière (et ne se souviendrait que d’une chose : ton nom, ce qui me fait m’interroger),
– Giacomo-Erico Branati, qu’on a connu beaucoup moins indulgent envers toi mon Francesco proposerait ses services pour nous aider à châtier cet Antonio Dupino à la langue bien pendue… etc.
Pauvre guilde….